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L'Artiste dans la Cité

La question du rôle de l’artiste dans la cité

Dans un de mes articles publié sur le blog d’une de mes associations, datant du 10 novembre 2013, je partageais ma réflexion sur l’engagement de l’artiste, plus particulièrement du compositeur d’aujourd’hui. Permettez-moi de vous en citer un extrait :

« L’engagement, si l’on veut qu’il soit une réelle remise en cause de notre système social, une des fonctions premières de l’artiste à mon sens, devient bien plus difficile que l’on ne pourrait le croire. L’artiste doit rester au sein du système qu’il critique afin d’y être entendu et compris. Paradoxalement, s’il met en pratique son message, il risque de se mettre en marge de la société et de ne plus pouvoir remplir son rôle. C’est peut-être pour cela qu’aujourd’hui l’image de l’artiste dit « contemporain » semble être celle d’un marginal déconnecté de la réalité. L’artiste ne doit-il alors pas être ancré dans l’univers social dans lequel il vit au lieu de s’enfermer dans son propre monde, par facilité ou par lâcheté ? Son titre « d’artiste » ne peut-il lui être confié que s’il remplit sa fonction ? »[1]

Plus d’un an plus tard, cette question de l’engagement de l’artiste et de son rôle dans la cité me semble toujours d’actualité. Plus encore, elle est primordiale si l’on veut maintenir l’art et la culture dans notre société. J’aimerais ici approfondir cette réflexion, au vu de mes dernières études et expériences.

Musicien mais aussi administrateur d’associations, je suis amené à élaborer et réaliser des projets musicaux. C’est parce que j’ai le désir de concrétiser les valeurs auxquelles je crois, et parce que j’ai le désir de participer à l’élévation de notre société vers un idéal – qui, certes, reste le mien – que je me lance dans ces aventures. Bien que je sois organisateur, je pense que je n’en reste pas moins artiste, revêtant la fonction évoquée dans l’extrait cité.

Cette question de l’ancrage de mes projets dans la cité est une question essentielle à laquelle je suis continuellement confronté. Il est évident que sans cet ancrage dans le monde d’aujourd’hui, dans notre société et son système, mes projets ne pourront jamais se réaliser. Mes valeurs ne pourront alors jamais se concrétiser et j’échouerai dans l’ambitieuse mission que je me veux remplir. Dans un autre de mes articles[2], j’encourageais les artistes d’aujourd’hui à imaginer. Maintenant, il m’apparaît qu’il faut aller encore plus loin : il faut imaginer de nouveaux moyens concrets. Nous ne pouvons trouver ces moyens qu’en nous ouvrant aux autres. Certes, c’est ce que nous, artistes, prônons sans cesse. Pourtant, il nous reste à faire un effort de prise de conscience, qui est de notre devoir d’artiste de notre temps : il nous faut nouer des relations dynamiques et de qualité avec nos environnements culturel, social et économique. C’est avec ce dernier que nous rencontrons quelques difficultés. La dimension économique nous échappe trop souvent. Pourtant, dans le contexte actuel, il est de moins en moins possible d’ignorer cet environnement économique.

Laissez-moi appliquer tout de suite mes propos et parler concrètement : notre société d’aujourd’hui, c’est le secteur privé ; il nous faut nous rapprocher des entreprises privées et travailler avec elles. En aucun cas nous ne devons renier nos valeurs – légitimes, fortes et essentielles, mais peut-être devons-nous les adapter à notre environnement. Offrons aux entreprises des services dont le noyau sera toujours notre Art, mais dont l’enrobage créera des rencontres et une mise en valeur des activités des entreprises.

Au regard de l’Histoire, cette approche n’a rien de nouveau : depuis longtemps, les arts sont considérés comme des outils de communication et de pouvoir. Seuls quelques mécènes ou ecclésiastiques illuminés ont considéré les arts d’abord comme élévation de l’esprit. Je crois profondément qu’aucune de ces considérations n’est fausse. C’est pour cela qu’il nous faut en prendre conscience, parce qu’il est de notre responsabilité de créer un équilibre entre nos idéaux et la réalité économique – et politique.

Parce que les entreprises, dans leur objectif de rentabilité, ne feront pas la démarche de se rapprocher de notre conception de la place de l’Art et du rôle de l’artiste dans la cité, c’est à nous d’aller vers elles et de susciter auprès d’elles un intérêt pour notre cause.

 

[1] DEROEUX (Emmanuel), L’Artiste doit-il être engagé ?, 10 novembre 2013, https://cinqhuit.wordpress.com/2013/11/16/269/.

[2] DEROEUX (Emmanuel), Le Concert aujourd’hui, 8 janvier 2014, https://cinqhuit.wordpress.com/2014/01/23/le-concert-aujourdhui/.